Un pardon qui fait de nous des fils

24ème dimanche du temps ordinaire de l'année C

Dans cette parabole du fils indigne et pardonné, Jésus multiplie les détails qui devraient rendre le fils impardonnable, mais, en fait, tout le récit converge vers un même point, qui est la révélation de la tendresse et du pardon de Dieu.
On peut imaginer la scène, au cours d’un petit déjeuner : "Voilà papa, je voudrais te dire quelque chose… j’ai bien réfléchi… tu as plein d’argent, mais tu es un peu vieux et tu n’en as pas vraiment besoin… moi par contre j’ai pas mal d’idées sur la façon de le dépenser. Il y a la part d’héritage de mon frère… ça, je ne veux pas y toucher. Mais si ça ne t’ennuie pas, la part d’héritage à laquelle j’ai droit, je préférerais l’avoir tout de suite."

On dit parfois que les paraboles sont des tranches de vie qui illustrent les réalités quotidiennes du monde ancien. Ce n’est pas toujours vrai, surtout avec les paraboles qui nous révèlent les sentiments de Dieu et son regard sur les hommes.
La réaction du père n’a rien de vraisemblable : non seulement il donne à son fils, qui est manifestement immature, sa part d’héritage, mais il la donne sans discuter et sans même poser de questions. Il ne donne pas de conseils et ne demande pas à son fils ce qu’il veut faire de cet argent.
Si cette parabole n’est pas le reflet de la réalité, c’est parce que rien ne peut se comparer avec la tendresse de Dieu.

Quant au fils pardonné, il va de soi que c’est chacun de nous, de même que chacun de nous est la brebis perdue : les 99 brebis restantes ne représentent personne, elles sont le décor de la parabole.
Dans cette histoire, le fils est particulièrement détestable : on a l’impression qu’il part sans dire "au revoir", et sans dire "merci". Et naturellement il vit dans le désordre et dépense sans compter. Dilapider une fortune est relativement facile : cela peut être relativement rapide et ne demande pas de compétences particulières.

Le fils que Jésus imagine est particulièrement détestable : égoïste, jouisseur, irresponsable, profitant de l’amour du père et méprisant cet amour. C’est un aspect important de la parabole : cela veut dire qu’il n’y a pas de péché que Dieu ne puisse pas pardonner, et pardonner totalement.
Le fils a cependant une qualité, et celle-là est nécessaire (sans elle, Dieu lui-même ne pourrait pas pardonner) : c’est que, finalement, il reconnaît qu’il a eu tort… il se convertit et il décide de changer.
Il faut que l’homme accepte et désire le pardon. Dieu ne peut pas pardonner si l’homme refuse son pardon ; sinon, le pardon de Dieu détruirait notre liberté !
Dans le discours qu’il veut tenir à son père, et qu’il se répète sur la route, il dit : "Père, j’ai péché contre le Ciel (contre Dieu) et contre toi."
Il reconnaît qu’il a péché, et il croit assez à l’amour de son père pour supposer qu’il acceptera de le reprendre comme domestique. Ce qu’il ne sait pas encore, c’est que le pardon du père sera total. Il ne lui pardonnera pas comme à un étranger ou à un serviteur, mais comme à un fils : il le reprendra comme fils, sans réserve.

Si on applique cela au pardon de Dieu, on voit bien que nous sommes tous dans la situation du fils pardonné.
Par rapport à Dieu, aucun de nous n’est un serviteur ou un étranger ; nous sommes tous ses fils, et quand nous recevons son pardon, nous seulement il remet notre péché, mais il nous restitue la filiation adoptive qui était la grâce de notre Baptême.

Si Jésus a imaginé cette parabole, c’est pour que ses disciples n’aient aucun doute sur le pardon de Dieu : un pardon sans réserve.
Et s’il a fait le Sacrement du pardon c’est aussi pour cela : pour que nous ayons la certitude d’être pardonnés.
Vous remarquez également que le père, dans cette parabole, ne pardonne pas à contrecœur : son pardon se manifeste dans une fête.
Son bonheur est de pardonner.

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