La prière obstinée

Frères et sœurs, chacune de nos rencontres se termine par une prière d’intercession… parce qu’il n’y a pas de progrès sans la grâce de Dieu, ni dans notre vie chrétienne, ni dans la mission. Ce qui explique l’insistance avec laquelle Jésus nous invite à la prière de demande.
Jésus dit une parabole pour montrer à ses disciples qu’il faut toujours prier sans se décourager : “Il y avait dans une ville un juge qui ne respectait pas Dieu et se moquait des hommes. Dans cette même ville, il y avait une veuve qui venait lui demander : ‘Rends-moi justice contre mon adversaire.’ Longtemps il refusa; puis il se dit : ‘Je ne respecte pas Dieu, et je me moque des hommes, mais cette femme commence à m’ennuyer : je vais lui rendre justice pour qu’elle ne vienne plus sans cesse me casser la tête’.” Le Seigneur ajouta : “Écoutez bien ce que dit ce juge sans justice ! Dieu ne fera-t-il pas justice à ses élus qui crient vers lui jour et nuit ? Est-ce qu’il les fait attendre ? Je vous le déclare : sans tarder, il leur fera justice. Mais le Fils de l’homme, quand il viendra, trouvera-t-il la foi sur terre ?” (Luc 18,1-8)
On a d’un côté un juge corrompu, qui n’est pas disposées à “bouger” : il ne veut pas s’attirer d’ennuis avec les puissants… de l’autre une femme dans la détresse, sans défense ni ressources, qui a besoin du juge : elle n’a pas de solution de rechange… elle va donc entamer une “guerre d’usure”… avec un sans-gène et une obstination sans limite.
Ce n’est pas une parabole sur Dieu et les sentiments de Dieu.
C’est une parabole sur nous… et sur la façon dont nous devons prier.
En fait, si le juge avait été juste et incorruptible il aurait rendu justice sans attendre… et il n’y aurait pas eu de parabole sur la nécessité d’une persévérance inlassable dans la prière !
Jésus veut nous dire que si on peut obtenir quelque chose de gens aussi corrompus que ce juge… combien davantage (Luc 11,13) obtiendra-t-on de Dieu, qui est amour et qui a le désir de nous sanctifier.
La sainteté suppose que l’on ait faim et soif des dons de Dieu (Mt 5,6) :
“Bienheureux ceux qui ont faim et soif de sainteté, ils seront rassasiés.”
Ce qui suppose une prière de demande inlassable.
Nous nous décourageons et croyons que Dieu n’exauce pas nos prières.
Nous ne savons pas voir ce qu’il nous donne, mais seulement ce qui reste non satisfait… et qui était sans doute le côté imparfait de notre prière.
Jésus précise que le Père donnera l’Esprit Saint à ceux qui le demandent (Luc 11,13)… ce qui veut dire qu’il ne faut pas demander n’importe quoi, mais d’abord les dons de l’Esprit. Nous devons purifier nos demandes.
Notre prière doit être : “Donne-moi ton Esprit d’amour.” Elle ne doit pas être : “Que ma volonté soit faite”, mais plutôt : “Que ta volonté soit faite”.
La parabole nous révèle l’immense efficacité d’une telle prière.
Par manque de foi, on néglige la prière, et on végète, et notre cellule végète. On prie du bout des lèvres… et on prie épisodiquement.
Prier avec foi, c’est demander avec un sans-gêne inlassable : c’est persévérer dans la prière au delà de toute espérance naturelle… c’est avoir “faim et soif de sainteté”, avoir un désir impérieux de voir progresser notre conjoint, nos enfants et notre entourage dans la sainteté, et de voir grandir notre cellule.
Nous vivons dans le temps… et une prière véritable est une prière qui persévère dans le temps.
Notre prière est beaucoup trop “légère” et épisodique… un jour, on demande la conversion, pour soi ou pour un autre… et pendant des semaines on “oublie” de la demander… on s’en désintéresse !
Ce qui suppose qu’on ne la désire pas vraiment.
Conversion et sainteté sont impossibles sans la prière de demande.
Cette petite histoire peut donc nous faire découvrir un trésor.
C’est ce que voulait dire Rabbi Hanina, qui vivait au IIIe siècle après Jésus, et qui avait imaginé une parabole sur les paraboles :
Nos maîtres ont dit : “Que la parabole ne soit pas une petite chose à tes yeux, parce que, grâce à elle, l’homme peut comprendre les paroles de la Loi.”
Parabole d’un roi qui, dans sa maison, a perdu une pièce d’or ou une pierre précieuse. Ne la cherche-t-il pas avec une mèche qui ne vaut pas plus d’un sou ?
Ainsi la parabole ne doit pas être une petite chose à tes yeux parce que, grâce à elle, on peut pénétrer les paroles de la Loi.
Si le roi n’avait pas cette mèche d’un sou, il ne trouverait pas sa pierre précieuse… ce qui est une invitation à ne pas mépriser les paraboles… ces petites histoires, qui ont l’air de rien, peuvent nous ouvrir le chemin de la sainteté.
Frères et sœurs, que le Seigneur vous bénisse.
JC.P.

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