On suppose parfois que les disciples prenaient leurs désirs pour des réalités. En fait, ils n’avaient jamais imaginé que le Messie puisse ressusciter de cette façon : rien n’était plus étranger à leurs désirs et à leurs attentes.
Ce jour-là, Jésus marche avec eux sur le chemin d’Emmaüs sans qu’ils le reconnaissent ! Pourquoi ne l’ont-ils pas reconnu ?
On peut imaginer des raisons diverses : ces deux disciples ne faisaient pas partie du groupe des Apôtres de Jésus, et ils ne l’avaient peut-être pas beaucoup approché. Et même en supposant qu’ils l’aient approché, quand on a vu un homme mourir sur une croix, on ne s’attend pas à le rencontrer trois jours plus tard sur la route.
On peut dire aussi qu’ils ne l’ont pas reconnu simplement parce que Jésus avait à leur parler avant de se faire reconnaître !
Sur la route, "Il leur expliqua dans toute l’Écriture ce qui le concernait." Une explication qui a dû les dérouter !
Que cherchaient-ils dans l’Écriture ? Ils cherchaient les textes "messianiques" : ceux qui annonçaient un Messie ou un Roi.
Jésus leur explique probablement que les passages qui le concernaient n’étaient pas uniquement les textes considérés comme messianiques.
Bien des textes prophétiques annonçaient la venue de Dieu dans ce monde, et Jésus leur montre que ces passages aussi le concernaient !
Le livre de Daniel parlait d’un "fils de l’homme" qui était un personnage quasiment divin, dont le règne était éternel et universel : un personnage qui héritait du règne de Dieu !
Jésus n’aime pas trop dire qu’il est le Messie, mais il se désigne constamment comme le "fils de l’homme".
On peut supposer qu’il leur a expliqué, avant tout, le chapitre 53 du livre d’Isaïe, où il est question d’un "Serviteur de Yahvé" : un personnage que les Juifs n’avaient jamais identifié au Messie… puisqu’il était l’inverse d’un Messie triomphant… et, pour les Juifs, un Messie souffrant et humilié était impensable.
"Il était méprisé et abandonné de tous, écrit Isaïe, et pourtant … c’est à cause de nos fautes qu’il était transpercé, à cause de nos péchés qu’il était écrasé … Il s’est dépouillé lui-même jusqu’à la mort … on l’a traité en malfaiteur, alors qu’il portait les péchés des hommes."
On trouve là l’expression parfaite de la mission de Jésus : lui, le Maître et le Seigneur, s’est fait "serviteur", et, comme ce personnage du livre d’Isaïe, il donne sa vie pour le salut du monde.
Les deux disciples comprennent que ces textes, qui n’étaient pas considérés comme des textes messianiques donnaient le vrai sens de la mission de Jésus, parce qu’il est beaucoup plus qu’un messie royal : il est Dieu, et il est le Sauveur du monde !
Le récit de saint Luc se termine par la "fraction du pain" : ils le reconnaissent à la fraction du pain.
On sait que le terme de "fraction du pain" était celui qui désignait l’Eucharistie pour les premiers chrétiens.
Le Christ est présent et agissant dans chaque Sacrement, mais l’Eucharistie est le Sacrement par excellence de la présence du ressuscité, aujourd’hui, dans son Église.
Note participation à l’Eucharistie signifie que, nous aussi, nous le reconnaissons aujourd’hui dans la fraction du pain.
La rencontre que nous faisons du Christ ne diffère en rien de la rencontre que les premiers disciples ont faite sur le chemin d’Emmaüs. C’est la même présence qui nous est offerte aujourd’hui.
Publié le 2011-05-08