Le jour de la Pentecôte, les Apôtres perçoivent des signes : ils entendent un bruit ; ce n’est pas vraiment un vent (nous dit le texte des Actes), mais c’est "un bruit semblable à un vent." Ils voient quelque chose ; ce n’est pas vraiment un feu, mais c’est "comme une sorte de feu."
Et le troisième signe, le plus important de tous : c’est qu’eux-mêmes se mettent à parler. Ce signe-là durera autant que l’Église.
Les signes qui leur sont donnés ce jour-là sont les signes d’une présence : une présence qui leur ouvre la bouche et les rend capables de communiquer leur foi, et qui, en même temps, ouvre le cœur de leurs auditeurs pour accueillir le message.
Jésus leur avait annoncé la venue de l’Esprit Saint, mais il est probable qu’ils n’avaient pas bien compris, et surtout qu’ils ne voyaient pas ce que pouvait être le rôle de l’Esprit pour faire d’eux des Apôtres. Jésus les avait choisis comme Apôtres et comme responsables de son Église, et ils pensaient sans doute que cette responsabilité était dans leurs moyens.
On rencontre parfois des gens qui ne doutent de rien, dans le monde politique ou dans la vie professionnelle ; et c’est beau la confiance en soi !
Il en faut un minimum : c’est un signe de bonne santé.
Il est vrai qu’on peut faire bien des choses sans l’Esprit Saint, mais il y a une chose qu’on ne peut pas faire : c’est entrer dans la vie des personnes divines : c’est un domaine qui dépasse les possibilités de notre nature humaine. Et il semblerait qu’on ne puisse pas non plus faire entrer les autres dans cette vie divine. On ne peut pas, avec nos seules capacités humaines, les faire entrer dans la vie éternelle.
Les Apôtres n’avaient pas compris ce qu’était le rôle de l’Esprit : comme principe de leur foi, et comme principe de leur mission d’Apôtres.
On a l’impression que, ce jour-là, ils sortent d’une période où ils avaient été totalement inconséquents avec leur foi.
Ils prennent conscience de l’inefficacité totale où ils ont vécu pendant ces cinquante jours, en tout cas par rapport à leur mission d’Apôtres. Ils comprennent qu’il n’y a pas d’efficacité apostolique sans la présence et la force de l’Esprit.
Et on peut constater en général que pour nous, comme pour les premiers Apôtres, Dieu nous laisse dans notre médiocrité tant qu’on n’a pas pris conscience du rôle de l’Esprit, tant qu’on n’a pas réalisé ce qu’il nous a donné depuis notre entrée dans l’Église par le Baptême, et tant qu’on n’a pas compris que lui seul peut faire de nous des témoins !
"Laissez-vous conduire par l’Esprit" dit saint Paul.
Mais attention : se laisser conduire par l’Esprit, ce n’est pas être passif.
Être un témoin c’est être agissant : prendre des engagements, et en même temps, savoir s’effacer, comprendre qu’on n’est qu’un instrument de l’Esprit de Dieu, et que lui seul peut convertir et sanctifier.
Ce qui est vrai pour soi-même comme pour les autres.
La sainteté exige que l’on fasse tout ce qui dépend de nous : c’est nécessaire, mais ce ce n’est pas suffisant… et tant qu’on ne comprend pas qu’elle est d’abord l’œuvre de l’Esprit, on n’avance pas.
Celui qui croit pouvoir se sanctifier seul est certain d’échouer.
De la même façon, être Apôtre, ce n’est pas être passif : c’est prendre des engagements au service de l’Église et de l’Évangile… mais si on croit pouvoir agir seul, on est certain d’échouer.
C’est le paradoxe de la mission d’Apôtre : on se donne tout entier pour une mission dont on sait qu’elle est sans proportion avec nos capacités.
C’est vrai pour tous ceux qui transmettent l’Évangile : prêtres, parents, catéchistes. Si on veut être plus malin que l’Évangile : escamoter ses exigences pour le rendre "acceptable", on ne peut pas être un instrument de l’Esprit.
Pour évangéliser, il ne faut pas être passif : il faut faire le pas, plonger, et, en même temps, se rappeler que seul l’Esprit de Dieu pourra changer les cœurs et rendre efficace notre engagement. Et si on a compris cela, il est plus facile de faire le pas.
Publié le 2012-05-27