"Un grand abîme a été mis entre vous et nous." Luc 16,26

26ème dimanche du temps ordinaire de l'année C

Cette parabole est un texte sur la béatitude éternelle et sur l’enfer… et, comme dans toutes les paraboles, Jésus nous en parle d’une façon imagée.
L’intérêt de ces images, c’est qu’elles sont un langage vivant et expressif… c’est aussi un langage qui demande à être manipulé et compris avec une certaine finesse.
On aurait tort de croire que ce soit un langage simpliste, s’adressant à des êtres primaires !
Le danger, quand on prend un auteur pour un primaire, c’est de ne pas comprendre son message… et le plus naïf n’est pas celui qu’on croit !

En ce qui concerne les paraboles de l’Evangile sur l’enfer, on peut observer un phénomène de bascule… et il n’est pas certain que notre époque ait basculé dans la vérité totale !
Pendant longtemps, on a pris toutes ces images à la lettre… on peut le voir dans les sculptures et les illustrations médiévales sur l’enfer.

Cet Evangile le décrit comme un lieu de torture… prenant cette image à la lettre, les hommes du Moyen-Age se sont demandés qui pouvait bien torturer les damnés !
Ils ont supposé, malgré tout, que ce n’était pas Dieu !
Alors ils ont imaginé que Dieu avait délégué cette tâche à des démons cornus et armés de fourches… ce qui revenait à prêter à Dieu une certaine hypocrisie !
Cet Evangile nous décrit également ce lieu comme une fournaise… et là aussi, on a imaginé que l’armée des diables était chargée d’attiser la fournaise !

Nos contemporains ont réagi contre cette imagerie… et certains, croyant réagir avec intelligence, ont supposé que l’enfer n’existait pas !
La balance est allée trop loin dans l’autre sens… parce que, dans ce cas, toutes les paraboles de l’Evangile sur l’enfer sont sans objet !
Non seulement Jésus aurait parlé en images, mais il aurait parlé pour ne rien dire !

Alors, qu’est-ce que l’enfer ?
On peut d’abord remarquer qu’il y a un point commun entre le péché et l’enfer… c’est que ni l’un ni l’autre ne sont l’œuvre de Dieu.
Dès l’Ancien Testament, les fils d’Israël avaient compris que Dieu n’est pas le créateur du péché… le récit du péché originel, même s’il est en partie imagé, nous dit cela très clairement.
Le péché, c’est notre œuvre… c’est notre choix libre.

En vérité, on peut dire la même chose de l’enfer.
Ce n’est pas l’œuvre de Dieu… ce n’est pas Dieu qui l’a fait !
L’enfer, c’est le péché, avec, en plus, l’endurcissement… c’est le péché, avec, en plus,le refus de se reconnaître pécheur et de se laisser pardonner.
Et si l’Evangile nous en parle… c’est pour nous dire : "Attention… vous êtes capables d’un tel endurcissement… vous êtes capables d’un endurcissement éternel !"

Cet Evangile nous dit cela d’une façon imagée : c’est l’image du "grand abîme"… éternellement infranchissable.
Et quand il nous parle de "lieu de torture" et de "fournaise", cette image ne veut pas dire que Dieu en rajoute !
Quand l’homme s’est détruit et coupé de Dieu, il n’y a rien à rajouter !
Cette image veut dire qu’un tel endurcissement a beau être un choix volontaire … c’est un choix qui fait le malheur de l’homme !
C’est de cela que le Fils de Dieu veut nous sauver.

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