Ce pour quoi ou pour qui on donnerait sa vie

18ème dimanche du temps ordinaire de l'année C

Vous connaissez l’histoire du jeune homme riche.
Elle a deux parties : «Que faut-il faire pour parvenir à la vie éternelle ?»
Jésus répond d’abord à cette première question : il faut «observer les commandements»… ce qui revient en fait à aimer… donner la priorité à l’amour… c’est sa réponse à la première question : c’est ce qu’il faut faire pour obtenir la vie éternelle.
Ensuite, il y a une deuxième réponse : «Si tu veux être parfait, vends tous tes biens, donne-les aux pauvres et suis-moi.»
Comme la plupart d’entre nous, le jeune homme n’est pas allé jusque-là… mais on ne dit pas que Jésus l’ait condamné… on dit qu’il l’a aimé… le jeune homme avait observé tous les commandements depuis sa jeunesse… on ne peut pas tous en dire autant.

La première lecture est tirée du livre de Qohéleth (ce qu’on appelait l’Ecclésiaste)… littérature de Sagesse : il dénonce ce qui est vanité… ce qui est vain… ce qui est un manque de sagesse… ce qui n’a pas de sens.
Il donne l’exempple d’une réussite professionnelle… celle d’un homme compétent… mais dont la vie a été surtout une accumulation de soucis… tout ça pour mourir et laisser sa fortune à d’autres.

On voit comment Jésus s’inspire du livre de Qohéleth… mais avec, en plus, l’idée d’une vie éternelle… ce qui donne à la sagesse une dimension nouvelle… Jésus imagine la parabole de l’homme qui entasse et qui se complaît en faisant le catalogue de ses richesses.
Dieu lui dit : «Tu es fou : cette nuit même, on te redemande ta vie.»
C’est la folie, ou le manque de sagesse de «celui qui amasse pour lui-même, au lieu d’être riche en vue de Dieu.»
Cet homme n’est pas incompétent… il est très doué dans son domaine professionnel… mais il est fou : tout ce qui compte, c’est la réussite sociale… il est inconséquent ou superficiel.
Il existe même une forme de folie aggravée… celle qui cherche avant tout à faire fortune… On entend parfois l’expression : «faire de l’argent»… là, on est loin d’un idéal de Sagesse.

Imaginez un enfant qui fait un château de sable sur la plage… il se donne du mal… et on a envie de lui dire que tout va disparaître avec la marée… mais finalement on ne lui dit rien… parce qu’on réalise que tout ce qu’on a accumulé disparaîtra comme son château de sable.

Jésus nous dit : «Là où est ton trésor, là sera ton coeur.»… On peut se demander où est notre trésor … qu’est-ce qui nous tient à cœur ?

C’est une question qui nous met un peu mal à l’aise.
En fait, Jésus ne veut pas nous mettre mal à l’aise… ce qu’il veut, c’est nous rendre libres pour ne pas perdre de vue l’essentiel… ne pas perdre de vue la condition d’enfant de Dieu reçue à notre Baptême.

Il nous dit : «Gardez-vous bien de toute âpreté au gain, car la vie d’un homme, fût-il dans l’abondance, ne dépend pas de ses richesses.»
En général, on est d’accord avec ça.
Ce qui fait le sens de la vie, pour la plupart d’entre nous, c’est autre chose. En fait, nos vraies priorités, ce sont pas les choses, mais les personnes… et les relations avec les personnes.

Ce qui est vraiment important, pour la plupart d’entre nous, c’est la famille : les enfants et petits enfants… on donnerait sa vie pour eux.

Mais en même temps cet Évangile nous met en garde… il nous invite à être plus conséquent avec ce qui fait le sens de notre vie.
La tentation existe de sacrifier plus ou moins sa vie familiale… parfois avec le prétexte de donner à ses enfants ce qu’il y a de meilleur.
Mais ce dont ils ont besoin, c’est d’abord de notre amour.
Ce dont ils ont besoin, c’est d’une éducation qui les aide à se maîtriser pour devenir des êtres libres et ne pas être esclaves de tous les vices.

Ce qu’on appelle la «morale», c’est ce qu’il faut faire ou ne pas faire.
La morale que nous faisons à nos enfants est parfois matérialiste… on leur demande de travailler… pour avoir une bonne situation… et s’ils travaillent bien, certains parents sont prêts à tolérer n’importe quoi.

Cet Évangile nous concerne… quand Jésus dit : Gardez-vous bien de toute âpreté au gain… il ne parle pas à des moines ou à des religieux… mais à chacun de nous… à ceux qui travaillent pour gagner leur vie.
Gagner sa vie c’est bien… mais l’âpreté au gain signifierait que l’argent passe avant les personnes.
Invitation à constamment s’interroger sur le sens de son travail… à s’interroger sur le temps donné à l’écoute de ses proches et au dialogue.

Aimer comme Jésus a aimé, c’est aimer jusqu’à donner sa vie.
On pourrait croire qu’un tel amour est exceptionnel… En fait, un tel amour n’est pas une étrangeté… il fait partie des dispositions ou des sentiments normaux des parents ou des grand parents… ils donneraient leur vie pour leurs enfants.

Mais il faut que ça se voie… qu’on ne dise pas de nous : «Il a un sale caractère, mais au fond, il aime sa femme… ou ses enfants !»
Ce qui suppose des remises en causes périodiques… une certaine vigilance… pour que cet amour des personnes soit visible… qu’il ne soit pas trop discret, mais qu’il se manifeste d’une façon quotidienne.

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