Frères et sœurs, j’aimerais revenir un instant sur la parabole du “Bon Samaritain” et la difficulté que nous avons, les uns et les autres, à identifier notre Oikos… à identifier cet entourage que Dieu nous donne à aimer et à évangéliser… et qui est si proche que nous ne le voyons pas.
La question du docteur de la Loi nous étonne : “Qui est mon prochain ?”
Et pourtant, notre question n’est pas différente, quand nous demandons : “Où est mon Oikos ?”
C’est une question paradoxale… on le voit bien quand on la traduit en français courant : “Où est mon entourage ?”
On a envie de dire : “Tu ne le vois pas ? Il est autour de toi !”
Mais les choses les plus simples ne sont pas les plus faciles à vivre… ni pour vous, ni pour moi.
C’est pourquoi je fais avec vous mon examen de conscience… et je me dis que si je n’ai rien vu sur ma route, c’est que je ressemble au prêtre ou au lévite de la parabole. En arrivant le soir à l’étape, ils pouvaient raconter qu’ils n’avaient rien vu, ni rencontré personne !
Mais comme eux, il est probable que nous avons dû enjamber un certain nombre de prochains sans intérêt… ou sortir du chemin et marcher dans les broussailles pour ne pas les piétiner.
On nous dit que les grands Saints se reconnaissent à leur pratique héroïque des vertus chrétiennes… et c’est vrai… mais cela nous fait peur.
On les imagine gravissant des sommets qui nous semblent inaccessibles.
En fait, le chemin qui conduit à la sainteté n’est pas un chemin qui va vers le haut… c’est un chemin qui descend… c’est une découverte de notre petitesse… Sainte Thérèse de Lisieux a su le dire d’une façon lumineuse… et c’est en cela qu’elle est “Docteur de l’Eglise”.
La spiritualité qu’elle exprime est une des plus proches qui soient de celle de l’Évangile.
Un chemin qui descend, cela devrait nous faire moins peur qu’une ascension sur une pente escarpée.
Jésus nous montre le chemin… il suffirait de lâcher prise, de temps en temps, pour descendre un peu avec lui… on le sait… et pourtant on continue de s’accrocher à la pente.
Il nous dit, avec une insistance qui devrait nous mettre en éveil :
“Laissez les enfants venir à moi ; ne les empêchez pas, car le Règne de Dieu est à ceux qui sont comme eux. En vérité, je vous le déclare, qui n’accueille pas le Règne de Dieu comme un enfant n’y entrera pas.” (Luc 18,16-17)
Ici, Jésus ne veut pas parler du “Royaume de Dieu” dans l’autre vie.
Il s’agit d’entrer dans le Règne de Dieu maintenant… d’entrer dans la mouvance de Dieu et d’être en phase avec lui.
Il s’agit de se laisser prendre par la main… après tout, c’est lui qui règne … et de se laisser conduire plus loin dans l’adoration… dans la rencontre du Père et du Fils… dans l’amour et le service fraternels.
Entrer dans le Règne de Dieu, c’est également être missionnaire. Et, là aussi, il faut y entrer comme un enfant.
Il ne faut pas imaginer des exploits missionnaires… c’est cela qui nous fait peur et nous décourage.
Et si, au moment du partage, on a l’impression de ne rien avoir à dire, c’est parce qu’on n’a pas d’exploits à raconter.
Oubliez les exploits… c’est une fausse piste ! Ce n’est pas là-dessus que doit porter notre partage hebdomadaire.
Pour être en phase avec le Règne de Dieu… et pour travailler à ce Règne… il n’y a qu’un secret : être comme un enfant.
Et c’est cela la Mission… c’est bien pour le Règne de Dieu que nous voulons travailler… ce n’est pas pour notre propre compte.
Devenir comme un enfant et se faire serviteur… ce sont deux aspects de la spiritualité de l’Évangile qui sont très semblables.
Un serviteur ne choisit pas son travail… il est payé pour faire tous les petits travaux sans discuter. Il ne sélectionne pas les travaux valorisants.
Quand on voit la façon dont Jésus s’y est pris pour être missionnaire, on se demande comment il a pu aboutir à quelque chose.
Il n’est pratiquement pas sorti de Galilée, qui était un coin perdu en Israël, qui n’était déjà pas grand chose dans l’empire romain.
Il n’a pratiquement pas eu de contact avec les gens influents… si ce n’est avec les scribes… mais il n’a réussi qu’à se faire mal voir !
On ne peut pas réussir dans ces conditions. N’importe quel conseiller en communication aurait pu le dire.
Comment le Fils de Dieu a-t-il pu faire de tels choix ? Parce qu’il travaillait au Règne de Dieu.
Il nous a montré le chemin… et il nous demande de marcher à sa suite. Ne sélectionnez pas vos prochains… prenez le tout-venant.
Ne cherchez pas quoi leur raconter… soyez vous-mêmes… ne cachez surtout pas votre petitesse… ce n’est pas de vous que vous faites la promotion… c’est du Règne de Dieu.
Frères et sœurs, que le Seigneur vous guide et qu’il vous bénisse.
JC.P.
Publié le 2008-10-13