Vous avez lu les dernières lignes des Actes : “(à Rome) Paul vécut deux années entières à ses frais et il recevait tous ceux qui venaient le trouver, proclamant le Règne de Dieu et enseignant ce qui concerne le Seigneur Jésus Christ avec une entière assurance et sans entraves.” (Act. 28,30-31)
Cette conclusion optimiste n’annonce pas une condamnation à mort.
En 63, le fait d’être chrétien n’était pas encore une cause de persécution.
Une autre captivité, très différente, est décrite dans la 2e lettre à Timothée, où Paul n’est plus gardé à domicile, mais enchaîné en prison.
Entre ces deux captivités, on peut supposer que Paul a fait un dernier voyage apostolique (63-67) sans lequel les indications données dans les lettres Pastorales (les lettres à Timothée et à Tite) ne s’expliquent pas.
Dans la lettre aux Romains, Paul disait son intention d’aller en Espagne, après une visite à Rome (Rom. 15,23-24 & 28).
En 96, dans une lettre aux Corinthiens, le Pape Clément de Rome écrit que Paul est “arrivé au terme de l’Occident”. Or, pour un romain le “terme de l’Occident” n’est pas Rome (qui est le centre de l’empire), mais l’Espagne.
Le “Canon de Muratori” (une inscription romaine de l’an 170) dit aussi que Paul est allé en Espagne après son premier séjour à Rome.
Il n’est donc pas impossible que Paul ait fait un cinquième voyage.
Les lettres pastorales mentionnent un séjour en Crète, un hiver passé à Nicopolis, et bien d’autres événements qui n’ont pas leur place dans les voyages précédents.
On peut tenter de reconstituer ainsi le dernier voyage de Paul :
Carte du dernier voyage de Paul
Après son départ de Rome et un voyage possible en Espagne, il fait un séjour en Crète, où il laisse Tite pour organiser l’Église (Tite 1,5).
Il fait un séjour à Éphèse, où il laisse Timothée, et voyage en Macédoine (I Tim. 1,3).
Il écrit la lettre à Tite, qui doit le rejoindre en hiver à Nicopolis (Tite 3,12), et la Ire lettre à Timothée : qu’il pense bientôt rejoindre à Éphèse (I Tim. 3,14). Il fait un passage à Troas, où il laisse un manteau et des livres (II Tim. 4,13)… c’est peut-être son arrestation qui l’empêchera de venir les reprendre.
Il a des difficultés à Éphèse avec “Alexandre le fondeur” (II Tim. 4,14) qu’il avait “livré à Satan” lors de son précédent voyage (I Tim. 1,20).
Passage à Milet où il laisse Trophime malade : (II Tim. 4,20). Arrestation.
Emprisonnement à Rome, d’où il écrit la IIe lettre à Timothée (1,17), et lui demande de le rejoindre avant l’hiver (II Tim. 4,21). Exécution en 67
La deuxième captivité romaine de Paul (67).
La captivité décrite dans la IIe lettre à Timothée est différente de celle qui est mentionnée par Luc à la fin des Actes des Apôtres.
Paul est prisonnier (II Tim. 1,8) à Rome (1,17) dans des conditions si rigoureuses et infamantes (1,12) qu’il demande à Timothée de ne pas rougir de lui (1,8). Il est “enchaîné comme un malfaiteur” (2,9).
Il est difficile de le visiter (1,17) et tous ses disciples d’Éphèse l’ont abandonné (1,15) sauf Onésiphore qui a eu le courage de venir à lui (1,16).
Lors d’une première comparution au tribunal, il a pu faire ajourner la sentence (4,16-17)… mais il sait que sa fin est proche (4,6-8).
Il attend Timothée (4,9 & 21). Seul Luc est auprès de lui (4,11).
L’incendie de Rome, du 19 au 24 juillet 64, avait dévasté dix des quatorze quartiers de la ville. Néron avait alors rebâti et amélioré la ville… mais (selon les “Annales” de Tacite) rien ne parvenait à faire taire l’opinion infamante d’après laquelle il avait lui-même fait propager l’incendie.
“Pour mettre fin à ces rumeurs, Néron inventa des coupables et fit souffrir les tortures les plus raffinées à ces hommes détestés pour leurs infamies et que le peuple appelait chrétiens. Ce nom leur vient de Christus, qui, sous Tibère, fut livré au supplice par le procurateur Ponce Pilate…
On arrêta d’abord ceux qui confessaient leur foi, ensuite, sur leurs indications, un très grand nombre d’autres furent accusés, non tant d’avoir mis le feu à la ville que de haïr le genre humain. On fit de leurs supplices un divertissement : les uns, couverts de peaux de bêtes, périssaient dévorés par des chiens ; beaucoup, mis en croix, étaient, lorsque le jour avait disparu, brûlés pour éclairer la nuit.” (Tacite, “Annales”)
La ville est donc reconstruite quand la persécution commence : sans doute après 65. A partir de ce moment, les chrétiens sont distingués des Juifs (dont la religion est autorisée) et sont persécutés comme tels.
Eusèbe de Césarée (un évêque historien du 4e siècle) écrit que Pierre a été crucifié à Rome en 66… et Paul décapité en 67, sur la route d’Ostie… la loi de l’empire interdisant de crucifier un “citoyen romain”.
Frères et sœurs, que le Seigneur vous bénisse, vous qu’il a également choisis pour être ses témoins.
JC.P.
Publié le 2009-05-11